Mon passé, mon présent, mon futur d’une graphiste culinaire

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Le passé, le présent, le futur d’une graphiste culinaire.
Est-ce que vous aviez déjà remarqué à quel point les fêtes de fin d’année favorisaient le rapprochement gastronomique ?
Lorsque Noël et le jour de l’an approchent, les boîtes aux lettres se remplissent de fascicules vantant des produits gastronomiques. Qui viendront à coup sûr garnir une table gigantesque autour de laquelle une famille se réunira.
Les mariages et parfois les enterrements, les évènements religieux, les anniversaires, autant d’occasions de se retrouver pour partager un repas.
Pour autant, l’art de partager un repas se perd de plus en plus. Parfois les familles s’agrandissent mais se délitent aussi. La tendance de partir en voyage pour les fêtes diminue le nombre de convives qui mangeront le soir du réveillon.

Peut-être faites-vous partie de ces personnes qui aiment changer d’air, découvrir de nouveaux horizons. Et qui profitent des vacances de fin d’année pour prendre le large et ouvrir leur esprit à de nouvelles cultures. Mais si, au contraire, vous chérissez les réunions, la table qui brille de mille feux. Les plats qui dégagent un fumet appétissant. Et les joues qui se colorent avec le partage d’un bonne bouteille de vin. Alors vous êtes comme moi.

La famille Italienne

Je viens d’une famille d’origine italienne, mon grand-père est venu en France chercher une vie meilleure. 
Chez nous les repas de famille sont une institution.
Avec les six frères et sœurs de mon père, une douzaine de cousins-cousines, et leur compagnon respectifs, et maintenant presque le double d’enfants. Autant vous dire que les tablées chez nous se faisaient dans le garage de mon grand-père. Et prenaient toutes la place ! C’est une tradition qui se perd.
Les repas de famille où l’on mange collés les uns aux autres. Où l’on se passe les plats remplis de bonnes choses. Où le vin coule et colore les joues des adultes tandis que la grenadine colore les lèvres des plus petits. Ces réunions de famille où les arrière grands-parents côtoient les petits-enfants, où les parents discutent avec les grands-parents. Où quatre générations cohabitent et prennent du plaisir à se retrouver pour manger. A profiter, à emmagasiner des souvenirs cocasses qui seront racontés, le sourire aux lèvres, lors du prochain repas. Qui prennent du plaisir à être ensemble, tout simplement.

Les tablées

À chaque repas, il y avait tellement de nourriture que nous restions le soir pour tout finir. Chaque année la table s’agrandissait avec l’arrivée de nouveaux amoureux ou amoureuses, la naissance de nouveaux bébés.
Et parfois une disparition soudaine laissait une place vide et un sentiment doux-amer.
Chaque famille crée des traditions. Du côté de mon père, nous finissions la journée en allant faire le plein de légumes dans le potager gigantesque de mon grand-père. Et le plein d’œufs frais dans son poulailler au fond du jardin.
Il fut même un temps où l’on tuait le cochon au fond du jardin. Et où l’on récupérait la sanquette pour en faire des steaks frais. Cette tradition est maintenant finie mais elle m’a laissée un souvenir immuable.

L’Italie

Lorsque nous partions en Italie, ce plaisir de se retrouver entre cousins, oncles et tantes, était le même. Mais le repas suivait un autre rythme. Si en France nous suivions le schéma classique “apéritif – entrée – plat – fromage – dessert”. Dans la province Vénitienne où habite ma famille, la table débordait : antipastis et charcuterie italienne, puis les lasagnes de Zia Cicilia en premier plat, au moins deux viandes et deux plats de légumes différents ensuite. Puis arrivaient le plateau de fromage, les dolci et le café, sans oublier les glaces à l’italienne, les vraies. Celles qui sont achetées le matin même chez l’artisan du village. Et dont le trop plein est jeté. Car la vraie glace italienne ne se garde pas (et gare à vous si vous émettiez l’idée de le faire devant Tatie Cicilia !).
Et quand vous pensiez que c’était enfin fini. Zio Beppo allait dans le jardin, et revenait avec une anguria (melon d’eau). Qui reposait tranquillement dans l’eau fraîche du puits. Et attendait son tour pour clôturer un repas gargantuesque, qui finissait invariablement en plein milieu de la nuit.

Et ça c’était chez chaque oncles et tantes ! À chaque retour d’Italie, nous revenions le ventre rempli, les yeux fatigués mais heureux d’avoir partagé ces merveilleux repas ensemble.
Les souvenirs garnissaient même nos valises : du parmesan frais acheté sur le marché du village, de la charcuterie tranchée finement, des bouteilles de vin pétillant, spécialité du nord de l’Italie et surtout production familiale. Et lorsque nous revenions en France. A chaque fois que nous partagions de nouveau un des nombreux trésors gastronomiques, que nous avions rapportés. C’est comme si l’Italie nous avait suivis, l’espace d’un court instant.
Nous étions de nouveau au milieu des vignes. A regarder le soleil se coucher, assis sur une table sur la terrasse de la maison de notre grand-oncle.

La famille Ariégeoise

Pour autant, il n’est pas nécessaire de venir d’une grande famille italienne pour vivre ces instants privilégiés. La famille de ma maman est plus petite et vient de l’Ariège. Les traditions ne sont pas les mêmes. Mais laissent autant de souvenirs impérissables : mes grands-parents qui nous emmenaient à la cueillette des cèpes dans la Montagne. Le foie gras fait maison est servi à chaque repas chez eux. Le placard du garage rempli de bocaux de pâtés qu’ils préparaient en nombre à chaque automne. Le congélateur qui débordait de saucisse home-made, les crêpes au Grand Marnier et les oreillettes de ma grand-mère…
Si certains de ces plaisirs ont disparu avec le décès de mamie Severina. Les recettes du pâté, de la saucisse et du foie gras perdurent avec mon frère et moi. Nous les transmettrons également à nos enfants. En espérant qu’elles ne se perdront pas au fur et à mesure de l’arrivée de nouvelles générations.

 

La transmission

C’est ce qui nous manque aujourd’hui, la transmission des traditions anciennes. Celles qui caractérisaient la Vieille France, la France de nos parents, de leurs parents, etc…
Notre société actuelle, notre génération et celle qui suit oublie. Les préparations sous plastique fleurissent dans nos supermarchés. Les petites épiceries locales peinent à survivre. Parfois au profit de plus grandes surfaces de vente, on achète vite, déjà prêt et souvent mal fait…la cuisine ne s’apprend plus, elle se transmet à peine.

Les nouvelles générations oublient ce plaisir de manger ensemble, de fabriquer, de transmettre. À nous de faire en sorte de ne pas laisser nos traditions culinaires et culturelles tomber dans l’oubli.

Le plaisir de cuisinier

Le plaisir de cuisiner de bons produits, et de les manger ensemble, se partage.
Alors partageons, donnons, transmettons à nos enfants cette joie que nous ont transmis les anciennes générations. Cuisinons, prenons le temps d’expliquer, plongeons nos mains dans la terre pour cultiver, trouvons l’occasion d’apprécier les produits de saison. Apprenons à nos enfants à reconnaître les légumes, les fruits. Admirons le changement de couleur du beurre dans une casserole. La fumée qui s’échappe du four pendant la cuisson d’un gâteau. Les traces de sauces qui décorent nos assiettes en fin de repas. Le bruit du pain frais qui craque lorsqu’on le rompt. Le ” pop ” caractéristique du bouchon en liège qui délivre enfin le vin prisonnier de la bouteille. Tous ces détails, ces souvenirs olfactifs et gustatifs qui ont traversé les générations avant nous. Et resteront ancrés dans nos mémoires. Comme dans celle de nos parents, ou de nos grands-parents, souvent partis trop tôt.
Pour qu’ils continuent de vivre à travers nos enfants, à travers cette tradition du ” bien vivre ” et du ” bien manger “. Et que notre tradition française et notre culture du repas perdurent à jamais.

Le passé, le présent, le futur d’une graphiste culinaire.